Alors que la France a déjà expérimenté la suppression de l’entrée en classe de 6e en fusionnant le CM2 et la 6e dans un « cycle de consolidation », une question se pose de plus en plus au Sénégal : faut-il suivre le même chemin ?
Dans un système éducatif sénégalais confronté à des taux d’échec élevés, des ruptures pédagogiques brutales et une transition difficile entre l’école élémentaire et le collège, la suppression de l’entrée formelle en 6e pourrait constituer une piste sérieuse de réforme.

🎒 Une transition souvent chaotique
Au Sénégal, le passage en 6e reste un cap délicat pour des milliers d’élèves. Changement d’environnement, nouveaux enseignants, multiplication des matières, méthodes d’évaluation différentes… Pour beaucoup, c’est un saut brutal plus qu’une progression naturelle.
Selon plusieurs études menées par des syndicats d’enseignants et des ONG éducatives, la rupture pédagogique entre le CM2 et la 6e est l’un des facteurs majeurs de décrochage scolaire en début de collège, notamment en milieu rural.
🇫🇷 Ce que la France propose
En France, le gouvernement a proposé une réforme qui vise à fusionner le CM2 et la 6e dans un même cycle, appelé « cycle de consolidation ». L’idée est de créer plus de continuité entre l’école primaire et le collège, avec des enseignants qui collaborent sur les mêmes programmes et un encadrement plus souple des élèves.
L’objectif ? Réduire les inégalités, mieux accompagner les élèves fragiles et atténuer la cassure entre deux univers scolaires très différents.
📚 Et au Sénégal, pourquoi ce serait pertinent ?
Plusieurs arguments plaident en faveur d’une adaptation de ce modèle au contexte sénégalais :
- Taux de redoublement et d’abandon élevés dès la 6e
- Manque d’harmonisation entre l’enseignement primaire et moyen
- Fracture linguistique : le saut vers un français académique plus poussé dès la 6e déstabilise bon nombre d’élèves
- Infrastructures inégales entre les écoles primaires (souvent communautaires) et les collèges publics
Selon Amadou Diop, inspecteur de l’enseignement moyen, « la suppression de l’entrée formelle en 6e pourrait permettre de repenser l’apprentissage comme un continuum éducatif, plutôt qu’un enchaînement de ruptures ».
⚠️ Des conditions à réunir
Mais pour qu’une telle réforme soit crédible, plusieurs conditions seraient indispensables :
- Une meilleure coordination pédagogique entre enseignants de CM2 et de collège
- Des infrastructures adaptées pour accueillir des classes de transition
- Une formation renforcée des enseignants à l’approche par compétences sur deux niveaux
- Un pilotage fort de l’État pour éviter des disparités régionales
🗣️ Vers une école plus fluide ?
La suppression de l’entrée en 6e ne doit pas être vue comme une simple mesure administrative, mais comme un levier pour repenser l’école sénégalaise autour de la continuité pédagogique, de l’équité et de la réussite des élèves.
Alors que le Sénégal s’engage dans une refonte progressive de son système éducatif, l’exemple français pourrait, s’il est adapté intelligemment, ouvrir la voie à une école plus fluide, plus inclusive et mieux arrimée aux réalités nationales.
Pape Cheikh FALL