Il m’a raconté de sa propre bouche, en 1951 que ,lorsqu’il prit la décision d’aller à la recherche de Serigne Touba, la première chose qu’il fit c’est de convoquer ses épouses et ses enfants. C’est ainsi qu’il leur dit : j’envisage d’aller à la recherche de mon guide et je ne sais pas si je le verrai ou pas. Mais je ne viendrai pas ici ,tant que je ne l’aurai pas vu. Donc je ne voudrai pas vous retenir ici. À la fin de votre délai de viduité, si vous voyez des hommes qui veulent vous épouser, alors vous pouvez vous marier.
« Le mardi où j’ai quitté Coky Gouy, je ne savais pas où me diriger. Mais je suis passé par Banjul , Sierra-Léone puis j’ai atterri à Douala. Pendant tout le chemin, je travaillais dans les bateaux et dans les marchés comme porteurs dans toutes les localités où je me suis retrouvé. À Douala, je me suis mis à errer dans la ville. C’est en cela que j’ai vu deux hommes qui parlaient en Wolof. Ainsi, je me suis rapproché d’eux et je leur ai demandé ceci : vous êtes Wolof je crois ? Ils répondirent : oui nous sommes Wolof. Et toi ? Je répondis : oui je suis Wolof. Alors, ils me demandèrent : Connais tu ( Cheikh) Ahmadou Bamba ? Je répondis : je ne le connais pas ! L’un des deux me dit : pourtant c’est un sénégalais. Il a été déporté au Gabon par l’administration coloniale. En ce moment, il est à Libreville. Mais je crois qu’il doit être transféré à Lambaréné. C’est sur cela que nous nous sommes séparés.
En cela, j’ai commencé à demander aux gens la voie pour aller à Libreville. Renseigné, j’ai pris la pirogue pour y aller. Arrivé à Libreville, je ne savais pas ou aller. Alors, j’ai commencé à errer dans la ville afin de me renseigner sur lui. Je n’ai cessé de demander jusqu’à ce que je sois renseigné sur lui et sur Lambaréné ou il était transféré. C’est à partir de là que je me suis mis à marcher en direction de Lambaréné.
De Libreville, j’ai marche 250 km pour arriver à Lambaréné. Je suis arrive à Lambaréné un mardi. En vérité, j’ai fait douze mois entre Coky Gouye et Lambaréné. Arrivé Lambaréné, j’ai vu Serigne Touba de loin sous un manguier. C’est ainsi que je me suis mis à ramper jusqu’à m’approcher de lui. Alors, près de lui, j’ai commencé à presser ses jambes. Mais il resta tout silencieux. Peu de temps, il me dit : Ahmadou, ta volonté est impressionnante ! Il y a beaucoup de gens qui ont reçu plus que toi venant de moi, mais en ce moment ils sont entrain d’en profiter chez et sur leurs lits. Je suis resté avec lui pendant six mois jusqu’au jour il m’a donné l’autorisation de retourner au Sénégal. C’est ainsi qu’il me dit : à ton retour, tu diras à ( Mame) Cheikh Anta de faire le voyage afin de venir me voir.
( Source orale, Serigne Moustapha Lô, traduction M. Moustapha Diop)
